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[Vidéo News]Souhait pour des stratégies plus fortes et claires et craintes au sujet du poids de la pension

Le bureau mauricien de L’Association of Chartered Certified Accountants (ACCA) a organisé le lundi 10 juin 2024 à Ebène, en collaboration avec le Mauritius Institute of Professional Accountants (MIPA), le PostBudget Forum annuel pour ses membres.

Après la présentation générale de Madhavi Ramdin-Clark (Head of ACCA Mauritius & New Markets) et avant le discours de conclusion de Kamal Raj Sadien, le CEO du MIPA, trois experts économiques et financiers ont partagé leur analyse du Budget 2023-2024 présenté le 7 juin : Pierre Dinan, économiste et consultant, Dheerend Puholoo, Tax Leader chez PwC Mauritius ; et Irshad Mallam-Hassam, Managing Director de Realign Consulting Services. La modératrice de la conférence était Premila Dewoo – Chief Financial Officer de IQ-EQ.

Pierre Dinan a rappelé des chiffres essentiels du dernier Budget, dont le PIB d’environ Rs 700 milliards et les prévisions annoncées pour une augmentation constante du PIB au cours des prochaines années, pour atteindre Rs 1000 milliards au cours de l’exercice 2026-2027. De même, le taux d’investissement est prévu en hausse, ainsi que les revenus de l’étranger. La dette publique devrait aussi augmenter d’année en année, ainsi que les dépenses dans les services publics comme la Santé, le Transport, la Sécurité sociale, rappellet-il. Mais, souligne Pierre Dinan, nous devons être prudents en lisant et en interprétant ces chiffres, car ils sont publiés en roupies à la valeur de l’année 2024 ; or, la roupie mauricienne n’a pas arrêté de se déprécier depuis des années – avec des dépréciations en points à deux chiffres – et cette tendance devrait persister.

« Il faut comparer ce qui est comparable », souligne-t-il. En répondant par la suite aux questions de l’auditoire, l’économiste a insisté que l’augmentation de la pension n’est pas soutenable. « C’est le cas déjà depuis des années. Il y a un vieillissement de la population, moins de personnes actives pour alimenter les fonds et, de plus, nous voyons un nombre grandissant de jeunes, qualifiés et compétents, quitter Maurice pour une vie ailleurs qu’ils estiment meilleure. La situation est grave!»

Il rappelle, plus généralement au sujet de mesures correctives touchant divers aspects de l’économie mauricienne, que le FMI a fait à nouveau plusieurs recommandations au gouvernement mauricien cette année suite à son évaluation annuelle. Parmi ces recommandations pour améliorer la situation du pays, se trouvent la prudence fiscale, la réforme de la pension de retraite publique, la réforme de la gouvernance des finances publiques, la digitalisation des finances publiques et le ciblage, entre autres, indique Pierre Dinan. Or, relève-t-il, le Budget 2024-2025 ne contient pas de mesures claires en ce sens.

Par ailleurs, un effort concerté de toutes les parties – gouvernement, secteur privé et citoyens – est nécessaire pour améliorer notre productivité et augmenter nos exportations afin de réduire le déficit commercial et soutenir le développement économique, soutient Pierre Dinan, qui regrette qu’il n’y ait pas eu d’annonce forte dans ce Budget pour prendre avantage des opportunités qu’offre le continent africain. Pour Dheerend Puholoo, l’annonce du Climate Responsibility Levy de 2% des profits touchant les entreprises ayant un chiffre d’affaires de plus de Rs 50 millions est en fait une nouvelle taxe. En attendant des précisions à ce sujet de la part des autorités, il reste à savoir si cette nouvelle mesure s’appliquera au Global Business. Les nouvelles exemptions fiscales des entreprises touchant à différentes catégories de revenus obtenus d’investissements ou de paiements sont les bienvenues, et seront utiles au secteur Global Business de Maurice là où elles s’appliquent, selon l’expert de PWC. Il relève aussi l’exemption de 80% qui est annoncée pour les sociétés ayant des activités centrées sur la robotique et l’intelligence artificielle.

A l’heure des questions, Dheerend Puholoo a souligné qu’en ajoutant le taux d’imposition de base des entreprises et les levies qui les touchent selon les catégories – les banques et les opérateurs de télécommunications par exemple – et avec le CSR levy, ainsi que le nouveau Climate Responsibility Levy, le poids de la fiscalité augmente clairement sur les entreprises installées à Maurice.

Le Global Business mauricien a plus de trente ans d’activité et il passe par des moments difficiles, soutientil. Nous avons toujours su nous adapter, et il y a eu des changements importants qui nous ont touchés, notamment avec l’évolution des accords avec l’Inde et les changements demandés par l’OCDE, estime-t-il.

Selon lui, la situation actuelle demande des actions. Le discours du Budget semble montrer par ailleurs qu’il y a une prise de conscience au sujet d’une nécessaire amélioration. Des mesures sont indispensables pour que notre place financière n’ait pas à faire face à de graves difficultés, souligne l’expert en fiscalité.

Irshad Mallam-Hassam, qui s’exprimait au sujet de l’impact des annonces budgétaires sur les entreprises, les nouvelles industries et les nouvelles technologies, relève que plusieurs mesures fiscales et de soutien gouvernementales concernent le développement de l’intelligence artificielle (IA) à Maurice. Toutefois, selon lui, il manque dans le Budget les indications d’une stratégie claire et cohérente au sujet de l’utilisation du potentiel de l’IA dans de nombreux secteurs.

« Les technologies IA et leurs applications sont présentes depuis une dizaine d’années et Maurice est en retard » affirme-t-il. Quelques applications de l’IA en tant qu’outil sont évoqués dans le Budget, ainsi que des projets concernant la formation, et une exemption fiscale pour des entreprises – qui sont pour l’instant en nombre très réduit – sont à saluer ; mais il manque un plan d’ensemble et se dotant des moyens d’une ambition forte, estime le directeur de Realign Consulting Services. De même, une réelle digitalisation des services gouvernementaux se fait toujours attendre et il manque des mesures ambitieuses pour attirer des entreprises informatiques étrangères à Maurice, alors que nous avons du potentiel pour cela. « Il y a certaines mesures positives dans le Budget, mais généralement on y voit aussi un manque d’ambition en ce qui concerne les technologies », pense Irshad Mallam-Hassam.

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