Reclassification de la grosse câteau verte
5 min readAujourd’hui marque un jalon important dans les 50 ans d’efforts de conservation pour sauver la grosse câteau verte ; le dernier perroquet endémique des Mascareignes.
L’UICN (Union International pour la Conservation de la Nature) a annoncé ce mardi 10 décembre 2019 le déclassement de l’espèce mauricienne sur sa liste rouge des espèces menacées : le perroquet se voit passer de la catégorie « En danger » à « Vulnérable »…
La grosse câteau verte (Echo Parakeet), aussi connue comme Psittacula eques par les scientifiques, a subi un déclin notable de sa population en réponse directe à la perte des forêts endémiques mauriciennes ; la végétation indigène périclitant d’une couverture complète de l’île pour aujourd’hui représenter moins de 1,5% de forêts de bonne qualité. De plus, la grosse câteau verte a également souffert de la présence de nombreuses espèces prédatrices introduites (singes, rats, chats) ou concurrentes (martins, perruches d’Inde). A la fin des années 70, la grosse câteau verte était ainsi devenue l’un des perroquets le plus rare au monde avec moins de 20 oiseaux à l’état sauvage, regroupés aux Gorges de la Rivière Noire.
Un programme d’élevage en captivité est mis en place dans le village de Rivière Noire en 1975 ; toutefois les techniques d’élevage pour la grosse câteau verte et les problématiques liées à la gestion en captivité ne seront pleinement maîtrisées qu’au début des années 90. Dès lors le nombre d’oisillons produits des oiseaux en captivité ont considérablement augmenté. La gestion des oiseaux survivant à l’état sauvage s’était aussi sensiblement améliorée. En 1997, suffisamment d’oiseaux sont élevés en captivité pour permettre des essaies de relâcher avec trois oiseaux dans la forêt de Macchabe.
Les oiseaux relâchés, ayant été formés pour se ravitailler de la nourriture complémentaire des mangeoires spécialement conçues, enseigneront assez rapidement à leur tour aux oiseaux sauvages. Les oiseaux élevés en captivité étaient aussi habitués aux nichoirs (nids artificiels) en bois et reconnaissaient ces derniers lorsqu’ils étaient placés dans la nature. Les tentatives précédentes d’inciter les grosses câteaux vertes sauvages à utiliser les nichoirs avaient été vaines jusque-là.
Le relâcher était un succès. Pendant une grande partie des années 90 et au début du 21e siècle, la grosse câteau verte a été l’une des espèces d’oiseaux la plus étroitement gérée au monde ; les actions de conservations englobant des relâchers d’oiseaux, l’amélioration des nids, l’installation de nichoirs artificiels, l’alimentation complémentaire, l’élevage en captivité, le maniement et le sauvetage d’œufs et d’oisillons, contrôle d’espèces prédatrices et concurrentes, entre autres. Des relâchers ont également eu lieu sur d’autres sites tels que Combo (2000), Bel Ombre (2003), la Vallée de Ferney (2015) et Ebony Forest (2018).
En 2004/05, un virus introduit extrêmement virulent, provoquant la maladie du bec et des plumes, ou PBFD pour Psittacine Beak and Feather Disease, frappe la population de la grosse câteau verte. La manipulation est aussitôt réduite afin d’éviter la propagation de la maladie. Fort heureusement, malgré une forte mortalité d’oisillons et de juvéniles, cela n’a pas endigué la croissance de la population de l’espèce. En 2007, la grosse câteau verte est déclassée de la catégorie « En danger critique » à « En danger ». Les tentatives de minimiser la propagation de la maladie ne se sont en fin de compte pas avérées fructueuses mais ont au lieu de cela permis de générer une population résultante plus robuste à la maladie.
Un effort considérable a été fourni pour perfectionner les nichoirs artificiels, un élément de gestion à long terme étant donné la dégradation continuel des forêts et par extension la disponibilité de cavités naturelles propices à la nidification dans les grands arbres endémiques continuera à voir un déclin général malgré tous les efforts de restauration. Toutefois, les zones comportant des forets endémiques de qualité (Brise Fer, Macchabe, Mare Longue, Bel Ombre) sont grandement utilisées par la grosse câteau verte pour les besoins d’alimentation et de nidification.
La population totale est actuellement estimée à plus de 800 oiseaux, un net progrès comparé au faible nombre enregistré dans les années 70, 80 et 90. Les relâchers dans les montagnes de Bambou (Vallée de Ferney) et Chamarel (Ebony Forest) s’annoncent prometteurs, avec des reproductions confirmées à la Vallée de l’Est (montagnes de Bambou). Les plus récentes sous-populations permettront d’atteindre mille oiseaux dans les années à venir. Toutefois, la restauration de l’habitat doit continuer à s’étendre, l’importation d’espèces envahissantes de perruches et de plantes suspendues, et la gestion rigoureuse de l’espèce poursuivie. Bien que ce déclassement soit un encouragement pour tous ceux impliqués, le travail doit continuer !
La grosse câteau verte est un modèle d’effort de conservation pour les autres perroquets menacés à travers le monde, et son succès n’aurait pu être possible sans le dévouement et le travail assidu de centaines de biologistes de terrain au fil des années. Plusieurs organisations ont également apporté un soutien considérable sur ces dernières décennies, d’abord et avant tout le National Parks and Conservation Service et le Forestry Service de Maurice, et également les organismes de soutien internationaux tels que le Chester Zoo (Royaume-Uni), Durrell Wildlife Conservation Trust (Jersey, archipel anglo-normand), World Parrot Trust (Royaume-Uni), Loro Parque (Ténérife), les universités tels que Kent, East Anglia, Reading, Zoological Society of London, les agences de financement programmatique internationaux et régionaux tels que le UNDP GEF Small Grants Programme et le Critical Ecosystems Partnership Fund, et les partenaires privés locale dont Ferney Co. Ltd, Ebony Forest, Mauritius Commercial Bank, IFS Foundation, et Terra Foundation, entre autres.
(Lien pour la liste rouge de l’UICN : https://www.iucnredlist.org/species/22685448/154065622)
(Lien pour le communiqué et chiffres de l’UICN : https://www.iucn.org/news/species/201912/species-recoveries-bring-hope-amidst-biodiversity-crisis-iucn-red-list)
(Lien pour le communiqué de BirdLife International : http://www.birdlife.org/worldwide/news/red-list-2019-guam-rail-2nd-bird-species-recover-extinction-wild)